La première fois que j’ai tiré sur une cigarette, j’avais 14 ans et j’étais en CE2H. Comme tous les adolescents de cet âge, il s’agit simplement de tester et de constater les effets. Dans ma mémoire 3H C’est l’une de mes meilleures années à l’école : je suis populaire, sociable et j’obtiens de bons résultats. Tout cela est très contradictoire, car 14 ans, c’est aussi l’âge où j’ai perdu mon père. Il s’est suicidé et n’a rien laissé ni aucun message derrière lui. Aurais-je goûté à la fumée si mon père n’était pas mort ? Honnêtement, je le pense. Est-ce que je deviendrais accro ? Cela, je ne le sais pas. Ma sœur n’est jamais tombée dedans
Au lycée, ma consommation restait récréative, mais augmentait sensiblement. Je me revois avec mon groupe d’amis se réunissant pendant les heures de travail ou avant la rentrée pour partager des feux d’artifice. A cette époque, je n’avais jamais fumé seul mais je commençais assez souvent. A la fin de ma dernière année, mon cher Sésame, j’ai obtenu le Baccalauréat Scientifique avec mention. Il y a un vide immense : je ne peux pas planifier l’avenir. J’ai toujours eu des facilités académiques et l’impression qu’on attendait de moi que je fasse ce qui est décrit dans l’imaginaire collectif comme des « grandes études ». Le problème c’est que je n’aspire ni à une prépa mathématiques, ni à étudier la médecine, ni au domaine de la finance, ni à une école de commerce. En revanche, je ressens le besoin de partir à tout prix. Donc en octobre je voyagerai dans un pays lointain.
Pendant un an, j’ai vécu sur une île. Je suis inscrit dans une université où je prends des cours d’anglais pour étrangers. Mais je n’aime pas cette expérience à l’autre bout du monde, je m’ennuie. À cette époque, je fumais rarement, seulement lorsque j’en avais l’occasion. Mais une chose est sûre, dans ma consommation, il y avait un avant/après de ce voyage. Après des années de thérapie, je crois que ma dépression était déjà latente. Je n’ai alors eu ni le deuil ni la crise de mon adolescence.
Quand je rentre en France, je suis toujours perdu. C’est difficile d’admettre que je n’ai pas aimé cette année de voyages. De plus, je ne trouve pas mes amis dispersés pour étudier, et je ne sais toujours pas quelle branche choisir. Alors, sur les conseils de ma mère, je me suis inscrit en licence de droit. Il semble que la loi ouvre de nombreuses portes. Je suis un peu plus âgé que mes camarades de classe et les cours sont très théoriques et mon cerveau mathématique s’ennuie beaucoup. L’année est compliquée, je ne travaille pas. Comme beaucoup, j’écris à nouveau.
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